Edith vous dévoile son Boop Project !
Bonjour Edith ! On est trop contentes de te poser quelques questions aujourd’hui pour le blog ! On a découvert ton action au téléphone, lors de notre entretien et on est tombées sous le charme de ta force, de ta créativité, de ta fraîcheur et de ta résilience ! (Oui, tout ça) Après un petit tour sur ton site et ton instagram, on a TOUT DE SUITE eu envie d’en savoir plus…
Ce qui nous amène aujourd’hui est donc ton combat et la façon dont tu as décidé de l’aborder et de l’illustrer, mais avant toute chose, comme chaque cancer et chaque femme sont uniques, peux-tu nous raconter comment s’est passé le diagnostic pour toi ? Du moment où tu t’es rendue compte que quelque chose clochait, jusqu’au moment de l’annonce par un membre du corps médical ?
Edith : Ma mère ayant eu 3 cancers du sein, j’ai toujours su que j’étais un profil à risque.
Pendant la mammographie, je vois le radiologue s’agiter. Il fait plus de clichés qu'à l'habitude et il décide de faire une échographie qui n'était pas prévue. Je comprends que ma vie s’apprête à basculer dans la quatrième dimension. Premier verdict : « Il y a une anomalie ! ».
J’essaye temps bien que mal de déchiffrer le compte rendu. Grade 3... Grade 4..., je n’y comprends rien, j’ai peur mais je me dis que ça ne peut pas m’arriver. C'est ma mère qui a des cancers, pas moi ! Je cours chez mon médecin qui me dit de prendre rendez-vous dans un hôpital spécialisé en cancérologie. Les 2 kystes que j’avais depuis plus de 15 ans ont soudainement grossi. J’ai 3 foyers cancéreux dans le même sein.
Que s’est-il alors passé dans ta tête, on dit qu’on passe souvent par différentes phases d’acceptation… incompréhension, déni, colère… comment as-tu vécu cette annonce bombe de ton côté ?
Edith : À ce moment-là, j'ai très peur, je pense à ma mère qui a eu 3 cancers du sein, dont le premier au même âge que moi. Ça me donne l’impression de me prendre un 35 tonnes en pleine gueule ! Au vu des examens médicaux, l'oncologue préconise d'office une mastectomie, suivi de 6 mois de chimiothérapie et 25 séances de radiothérapie. Malgré cela, je refuse de la croire. Je suis en plein déni. J'attendais impatiemment d'avoir le compte rendu post-opératoire du chirurgien. J'avais espoir que les nouvelles soient bonnes, mais comme mes ganglions étaient atteints, il a validé le protocole prescrit par l'oncologue. J'ai pleuré toutes les larmes de mon corps et j'étais très en colère que mon cancer n'ai pas été détecté l'année précédente.
Finalement quand j'ai fini de pester, je me suis relevé et je suis allée de l'avant.
J’ai par la suite créé une exposition qui illustre le parcours émotionnel qui jalonne le parcours de soin, et cela dès l’annonce de la maladie. Le thème de l'exposition est « La courbe du phénix ». L'exposition itinérante était visible jusqu'au 30 juillet à l'hôpital Saint-Louis (Paris).
Pendant ton combat, tu es passée par plusieurs opérations et traitements lourds de conséquences sur le corps et son apparence, comment as-tu vécu ces changements ?
Edith : J’ai eu une mastectomie avec une reconstruction immédiate. Bizarrement ce qui m’a rendu l'opération acceptable, c’est de savoir qu'elle a été filmée. Pendant qu’on m’enlevait le sein, une centaine de médecins regardaient l’opération en direct. J’avais le cœur brisé parce que j’allais perdre mon sein, mais je me consolais de savoir que cela allait servir à faire progresser la science . Quand j’ai vu le résultat de ma reconstruction j’ai failli m’évanouir. À cet instant-là je me suis dit, 2 choix s'offrent à moi. Soit je m'effondre et je ne me relève pas... soit je me bats de toutes mes forces pour combattre ce foutu cancer ! J'ai choisi la seconde option mais avant j'ai pris le temps de me soigner. La perte de mes cheveux a été très difficile à accepter. J’ai toujours eux de belles boucles blondes. Enfant, on m’appelait boucle d’or. Autant vous dire que l’annonce apocalyptique suivie de la chimiothérapie a chamboulé l’image que j’avais de moi. J'allais passer de boucle d'or à Gollum. J’ai préféré tout raser plutôt que d'avoir 2 ou 3 touffes de cheveux ici et là. J’ai alors demandé à mon fils de s’improviser coiffeur, avec comme seule consigne de s’amuser... C’est exactement ce qu’il a fait ! Ce moment que je vivais comme un drame s’est soudainement transformé en un moment de tendresse entremêlée de rires, de larmes et de rires à nouveau… Puis nous avons improvisé une séance photo pour immortaliser les différentes coupes.
Nous œuvrons chez Keep A Breast pour la sensibilisation et le soutien face au cancer du sein, à travers notamment les arts et le sport. Qu’est-ce qui t’a aidée toi, au quotidien, pour traverser cette épreuve ? C’est ainsi qu’est né Boop project ?
Edith : Quand j'ai été diagnostiquée d’un cancer du sein à 46 ans, ma mère qui est une adepte de la pensée positive m'a dit " Tu sais Edith, ils en font tout un truc de la chimio, mais c’est pas si difficile que ça." (LOL !) Quand j’entends cette phrase, je la prends au 1er degré. Je n’arrive pas à croire qu’elle ait pu oublier à quel point la chimio est difficile ! En réponse à cette phrase, je rassemble toutes mes forces pour faire des photos et des vidéos pour ne pas oublier. Je me dis que si la chimio me crame le cervelle à moi aussi, j’aurai de quoi me souvenir de moi chauve et affaiblie. Je ne veux surtout pas oublier le moment le plus difficile de ma vie. Les photos et la vidéo ont été une réelle thérapie pour moi. L'idée du blog illustré m'est venue spontanément quand j'ai lancé mon site internet et mes différents comptes sur les réseaux sociaux. C’est comme ça que j’ai créé Boop project.
Pour ce qui est de la pratique sportive, la natation est mon sport de prédilection. J'ai continué la natation tout au long des traitements de chimiothérapie et j'ai recommencé environ 5-6 semaines après chaque opération. Dès que mes médecins m'y autorisaient.
J'ai été accompagnée d'un coach sportif de la CAMI sport. Cela m'a permis de retrouver une mobilité rapidement, de mieux lutter contre la fatigue et de retrouver une vie sociale.
J’ai même fait du « air swimming » dans les couloirs de l'IGR pour les besoins d’un film !!!!
Tu peux nous raconter un peu en quoi consiste, et ce que tu y fais ?
Edith : Je suis styliste et illustratrice et j’ai notamment travaillé chez Christian Dior et chez Chanel. Le cancer met en exergue mon besoin vital de mettre du sens dans ma vie. C'est pourquoi j'ai fait une reconversion professionnelle. L’envie de faire de la prévention contre le cancer et de l’accompagnement de patients est devenu pour moi une évidence. Je choisis donc d’en faire mon -mes- métiers. Je suis « Patient partenaire » en cancérologie (Diplôme Universitaire Sorbonne) et graphiste en communication digitale « éthique ».
En plus de la reconversion je crée l'association Boop project qui communique de façon positive, auprès des femmes et de leur entourage, pour aider à mieux lutter contre la maladie. Nous produisons et diffusons des contenus à partager dans les hôpitaux et sur les réseaux sociaux.
À part ton site et ton IG, on peut admirer tout ça quelque part ? As-tu de nouvelles actus à venir ? On est tellement fans de ta créativité et de ta détermination !
Edith : Mon premier projet est une série de 10 films courts de 3 à 5 minutes, qui traite avec humour et bienveillance du cancer du sein.
Pour l’instant 6 vidéos (démos) ont été réalisées au smartphone, en amont des traitements par Jeanne Picard Depalle qui est assistante-réalisatrice. Elle est aussi ma belle-fille ;)))
Une autre série « drama comédie » de 10 films thématiques inspirés de mon blog illustré est en cours. J’y interpréterai mon propre rôle, entourée de « Guests stars !».
Les fictions seront enrichies avec deux modules de témoignages de soignants et de patients.
Pour toucher un large public, les films seront diffusés dans les hôpitaux, à la télévision et sur le web en octobre 2022.
Il y a aussi une série de 4 livres illustrés qui verra le jour en octobre 2022. Ces ouvrages ont pour but de faciliter l’échange a tour du cancer entre parents et enfants. Le cancer est une maladie grave et qui fait peur. Il n’est pas évident pour un patient d’en parler avec son entourage. C’est un sujet tabou qui génère de la gêne, de l’inquiétude... Autant de
choses qui perturbent la vie des patients et de leur entourage. En proposant des ouvrages ludiques cela devient plus facile.
Avant de terminer cette interview, y a-t-il quelque chose que tu voudrais dire aux personnes qui te lisent aujourd'hui et qui traversent la même épreuve que toi ?
Edith : La maladie m’a permis de découvrir un trésor au fond de moi. L’envie d’aider, de
transmettre, de communiquer de façon positive sur un sujet grave en y apportant de la légèreté. Mais aussi de prendre du temps pour moi et d'écouter mon corps parler.
Et à toutes les autres ?
Edith : Comme j'ai toujours été un profil à risque, je fais une mammographie tous les ans, depuis mes 25 ans. Dès mon premier examen, le médecin a repéré des bosses dans mon sein droit. Comme j'ai toujours vécu avec ces bosses, l'année de mon cancer je n'ai pas remarquée à quel point elles avaient grossi. C'est le contrôle annuel qui m'a sauvé la vie ! Faites-vous contrôler régulièrement. Cela peut vous éviter de vivre le traumatisme de traitements lourds comme la chimio.
Merci mille fois Edith d’avoir répondu à nos (nombreuses) questions ! On conseille à toutes celles et ceux en manque d’inspiration ou en gros coups de blues de te suivre, ton site et tes actions sont à consommer à volonté pour une meilleure santé mentale ;) On te souhaite le meilleur pour la suite Edith !